Portraits d’un oubli.
Le bidonville de Lorette
Nora Mekmouche
dessins de Samiha Driss
Parution : le 23 novembre 2007
ISBN : 978-2-9523817-3-4
Format : 21 cm X 21 cm
84 pages
21 cm X 21 cm
14 €
Présentation :
Juin 1995 marque la fin d'une histoire, celle du bidonville de Lorette. Rasé de la carte, Lorette n'existe plus. Ses habitants ont été déplacés d'un « trou » à une colline. Le nouveau quartier porte d'ailleurs le même nom. Volonté des habitants ? Des politiques ? Que reste-t-il de cette mémoire ? Comment s'interdire d'oublier quand le paysage ne montre plus rien, du moins autre chose ? Quand en quelques mois, la terre a été retournée, quand les souvenirs, les briques et les tuiles posés s'enfouissent au plus profond de cette terre qui les a accueillis pendant plus de trente ans. La mémoire gît-elle sous les décombres de l'oubli ? À travers les témoignages de certains habitants de ce bidonville, ce livre se propose de transmettre cette mémoire pour effacer l'oubli et surtout refuser un autre trou, le « trou noir ».
Extrait:
Les briques et les tuiles se posent, les murs s’érigent avec affront, la terre s’affaisse tant le poids de l’offense est lourd, les tôles ondulent et se courbent, la nuit doucement enveloppe ce bout de terre… « Ça y est, c’est fait ! » La terre est accueillante ! Un toit, puis deux, puis… Un village, « le même que dans mes souvenirs de là-bas. » Enfin, presque. La vie s’anime dans cet antre, juste pour… survivre. Des silhouettes apparaissent, courbées, affublées de sacs, de bois, d’enfants gesticulant et se perdent dans le dédale des ruelles humides et sombres du village. Les ombres remplacent les silhouettes et tentent de se frayer un passage, évitant là les flaques, là les tas, là les rats et disparaissent dans un rai, happées par une faible lumière finissante. Le calme redevient plat, seules dans le ciel gémissent les fumées denses des foyers mal chauffés par cette nuit d’hiver… Reléguer, éloigner, étouffer, rejeter, mépriser, nier pour domestiquer et contrôler l’espace ? Ou les hommes ? Pour maintenir un ordre ? Ou l’ordre ? Masquer une réalité ou la rendre invisible ? tant d’amertume interdite, tant de rancœur confisquée, tant d’incompréhension et de silences soumis… Pourquoi nous ? Enfin, eux.